Zoom sur…Les becs des oiseaux

par | Juin 4, 2017 | Comprendre | 0 commentaires

Après deux articles sur les oiseaux et la nourriture (partie 1 et partie 2), regardons d’un peu plus près ce formidable outil qu’est le bec ! Il suffit bien souvent d’observer la forme et la taille du bec d’un oiseau pour en savoir plus sur son régime alimentaire. Nous allons dans cet article nous attarder sur ces formes très variées par le biais d’exemples.

Un bec court et aplati : l’Oie cendrée herbivore

À la question « Que mangent les oies ? », les réponses les plus fréquemment données : « du pain » et « du poisson ». Or, l’Oie cendrée, de même que tous les membres de la famille des Anatidés, ont un bec aplati et à l’extrémité arrondie. Avec une telle configuration, impossible de retenir un poisson frétillant ! (Et elles n’ont pas de poches non plus pour y mettre la monnaie pour leur baguette quotidienne)

(Rappel: pourquoi il ne faut pas donner de pain aux oiseaux)

Les oies présentent des lamelles filtrantes à l’intérieur du bec. Avec l’action de la langue, le bec joue alors le rôle de pompe filtrante : l’eau est aspirée à l’avant du bec et « recrachée » sur les côtés, via les lamelles. Ensuite, les particules nutritives seront ensuite récupérées et ingérées par l’oie.

L’oie cendrée, avec son bec court et aplati, va donc se nourrir exclusivement de végétaux. Elle ne se contente pas de végétaux aquatiques : elle est également une excellente tondeuse! Graines, tubercules et racines complètent le menu.

Voilà pourquoi il est complètement STUPIDE de donner de la pizza à un anatidé

Un bec court et fort : le Verdier d’Europe granivore

Le Verdier d’Europe et ses cousins de sa famille des Fringillidés présentent un bec particulièrement adapté à la consommation d’un aliment difficile à décortiquer : les graines. Leur bec est fort, court et de forme conique. Le crâne de ces oiseaux s’est également adapté à la consommation de graines en adoptant une musculature puissante. Les fringilles se servent des bords coupants de leur bec pour trancher la graine. Fait étonnant : la mandibule inférieure est capable de réaliser des mouvements de l’avant vers l’arrière pour cisailler la graine !

D’autres oiseaux granivores, les Bruants, de la famille des Embérizidés, cassent les graines à l’intérieur de leur bec. Celui-ci est adapté : des crêtes traversent leur palais, crêtes dures contre lesquelles la graine est écrasée grâce à l’action de la mandibule inférieure.

Un bec long comme une paille : le Colibri nectarivore

Autre famille d’oiseaux au régime strictement végétarien : les Trochilidés, couramment appelés Colibris. On pourra également ajouter les Souimangas qui sont des passereaux, contrairement aux colibris. Ces oiseaux sont ultra-spécialisés : leur bec long et souvent courbé leur permet d’atteindre une source de nourriture inaccessible aux autres oiseaux, à savoir le nectar des fleurs. La langue très allongée et bifide leur permet de recueillir le précieux liquide.

« Wouhouuu, les gars, ce soir c’est la fête !! »

[BONUS] Une petite photo de l’un de mes colibris préférés, le Colibri porte-épée, dont le bec est une merveille d’adaptation.

N’est-il pas magnifique ?

Et c’en est fini pour ce qui est des oiseaux végétariens, intéressons-nous maintenant aux chasseurs.

Un petit bec fin : l’hirondelle insectivore

 

Un grand nombre d’oiseaux se nourrissent d’insectes ou en ont au moins quelques-uns dans la composition de leur régime alimentaire. Il y a donc dans ce groupe des insectivores des becs assez différents, surtout en terme de longueur. Ils ont pour point commun d’être fins. Attraper un insecte demande en effet quelques bons réflexes mais ne nécessite pas des mandibules surpuissantes.

Insectivores stricts, les hirondelles aiment chasser en vol. Elles sont des pilotes hors-pair et n’hésitent pas à effectuer des manœuvres complexes pour attraper mouches, pucerons, papillons et hyménoptères.

Les oiseaux strictement insectivores sont bien souvent des migrateurs efficaces : en hiver, les insectes sont une denrée rare dans nos contrées…Aussi vont-ils chercher plus au sud quelque proie à se mettre dans le bec. Par la spécificité de leur régime alimentaire, ils sont également parmi les oiseaux les plus menacés de disparition. Avec l’utilisation massive de pesticides, leur source de nourriture tendent à disparaître. Et ils ne peuvent s’adapter rapidement, contrairement à des oiseaux généralistes (comme le Moineau) qui sont capables d’étendre la gamme de leur régime alimentaire.

Pour en savoir un peu plus sur les hirondelles et les menaces qui pèsent sur elles, voici un court reportage de la Salamandre :

 

Un bec très long et fin : le Chevalier gambette

Un bec fin, voilà un insectivore me direz-vous ! Le Chevalier gambette, oiseau de la famille des Limicoles, se délecte à l’occasion de quelques insectes. Mais son long bec indique surtout que les insectes ne sont pas sa spécialité. Comme tout bon limicole qui se respecte, le Chevalier gambette parcourt les vasières à la recherche de mollusques ou vers. Ce long bec lui sert à atteindre ces proies qui se dissimulent sous la vase.

La famille des limicoles compte donc dans ses rangs des oiseaux qui se nourrissent dans les vasières. Or, toutes les proies, des mollusques aux vers, ne vivent pas toutes à la même profondeur dans la vase. Aussi, contrairement aux insectivores stricts qui ont tous pour point commun un bec court et fin, les limicoles mangeurs de mollusques présentent une diversité extraordinaire de tailles de bec. Quand le Chevalier gambette peut enfoncer son bec dans quelques centimètres de vase, le Petit Gravelot se contente, avec son bec court, de la surface. Le Courlis cendré peut, grâce à son immense bec recourbé, atteindre des profondeurs beaucoup plus importantes et débusquer les proies qui s’y cachent !

« Par contre, question aérodynamisme, mon bec est pas terrible… »

Un bec droit et puissant : le Martin-pêcheur piscivore

Lorsque vous devez attraper un poisson, le maintenir pour éviter qu’il ne s’échappe puis le positionner correctement afin de l’avaler, et tout cela avec comme seul outil votre bec, mieux vaut que celui-ci ait la forme adéquate ! Le Martin-pêcheur observe les poissons juché sur un perchoir. Une fois la proie repérée, il plonge, quasiment à la verticale, les ailes repliées vers l’arrière. Il s’immerge totalement et, une fois la proie capturée grâce à son long bec puissant, remonte à la surface en battant violemment des ailes. Il regagne alors son perchoir sur lequel il pourra frapper le poisson pour l’assommer. Le Martin-pêcheur va l’avaler d’un coup, en prenant soin de le mettre dans le bon sens: la tête la première, afin de ne pas être gêné par les écailles.

Les oiseaux qui se nourrissent de poissons peuvent également présenter un petit crochet au bout de leur bec, adaptation morphologique qui les aident à maintenir le poisson fermement. On peut l’observer notamment chez le Grand Cormoran. Chez les Harles, en plus d’être terminé par un crochet, le bec présente des excroissances cornées sur les côtés des mandibules. Cela permet une meilleure prise du poisson.

Un bec court, puissant et crochu : la Buse variable carnivore

La Buse variable est le rapace le plus commun d’Europe centrale. Comme tout bon rapace qui se respecte, elle présente un bec crochu parfaitement adapté pour maintenir et déchiqueter une proie. Comme nous l’avons vu dans l’article « Une histoire d’Oiseaux : les Rapaces », couplé à des serres puissantes et une vue perçante, ce bec permet à la buse d’être un chasseur hors-pair. Au menu : principalement des micro-mammifères, comme les campagnols.

« On parle de campagnols ici ? »

Une famille de passereaux présente le même type de bec : les pies-grièches. Leur bec court et crochu leur permet de chasser de gros insectes voire de petits vertébrés comme de jeunes campagnols et des lézards. Pour maintenir leur proie mais également pour les stocker les jours fastes, les pies-grièches les empalent sur de grandes épines de la végétation ou sur le fil barbelé. Cet emplacement est appelé un lardoir.

Des becs remarquables

Pour finir cet article sur les becs des oiseaux, regardons quelques becs de forme extraordinaire. Tous témoignent d’une formidable adaptation de l’oiseau à son milieu et surtout aux ressources qu’il contient. Se spécialiser dans la consommation d’une ressource bien particulière présente un avantage majeur : la concurrence est bien moindre! Inconvénient de cette stratégie : si la ressource s’amenuise ou disparaît, l’oiseau aura de grandes difficultés à s’adapter.

Parmi les oiseaux fort spécialisés, citons le Flamant rose et leur bec inversé dont les mandibules présentent des peignes kératinisés afin de retenir le plancton.

 

« Plaît-il ? On parle de moi ? »

Sur le podium des becs hors-normes, celui des Toucans est également en très bonne place ! Surdimensionné par rapport à la taille de l’oiseau, il lui permet non pas de se nourrir d’aliments très particuliers (les toucans se nourrissent d’insectes et de végétaux) mais de réguler sa température.

Enfin, autre bec très particulier chez les oiseaux, celui du Bec-en-sabot du Nil, oiseau à l’allure quasi-préhistorique endémique du continent africain. Essentiellement piscivore, le bec très puissant de cet oiseau hors du commun lui permet également d’attraper des protoptères, des poissons capables de s’enterrer dans la vase pendant la saison sèche.

Et c’est tout pour aujourd’hui ! Vous avez des questions ? Une petite envie de papoter d’oiseaux ? Une idée de sujet, d’une thématique que vous souhaiteriez que j’aborde dans un article ? Retrouvez-moi sur FacebookTwitterInstagramPinterest et LinkedIn

Sources et recommandations :